A l’issue de votre voyage dans les symboles maçonniques (les 4 premiers grades du RER), vous franchirez un seuil : celui de l’esprit chevaleresque qui, comme nous l’avons déjà évoqué dans l’article de la page d’accueil, sous-tend notre voie initiatique. Pourquoi ce virage de statut de constructeur de temple équipé d’outils de « travailleur » à celui de chevalier, axé sur un esprit plutôt tourné vers la noblesse et connoté élitiste?

Deux courants de pensée cherchent à expliquer ce processus :

  • L’un arguant d’une liaison étroite, spécialement lors des croisades, entre les corps de métiers des constructeurs des fortifications, des murailles et des châteaux, des églises et des « hostelleries » de pèlerinage, et les ordres militaires, commanditaires de ces constructions et chargés de la défense et de l’administration des croisés.
  • L’autre considérant le changement de vocable en 1747 de « confrérie » ou « fraternité » par celui d’ « ordre » et le contexte socio-politique qui prévaut à cette période de notre histoire franco-anglaise. Ce besoin d’ordonner une société en plein chaos révolutionnaire, tant en Angleterre qu’en France, est formulé par le discours du Chevalier de Ramsay et s’est tourné naturellement vers l’inspiration templière élaborée par le Baron Von Hund en Allemagne. Il conteste tant l’autorité monarchique que républicaine. C’est ainsi qu’un grand nombre de nobles constitueront les rangs des loges maçonniques.

Au final, l’institution chevaleresque, signature d’un système d’ordres, est ainsi culminante en franc-maçonnerie. On peut dire qu’elle est sous-tendue par deux pôles fondateurs qui en définissent l’éthique :

  • La sacralisation du métier de constructeur, c’est-à-dire de l’éthique du « travail »,
  • La sacralisation de la Force protectrice du faible, c'est-à-dire la Bienfaisance du chevalier

Le constructeur avec ses outils, comme le chevalier défenseur avec son épée, sont des puissances décisives dans la reconstruction de notre Temple Intérieur.

 

L’EPOPEE DES CHEVALIERS

Pendant près de trois siècles l’Eglise à tenter de transformer une bande de guerriers pillards et rançonneurs en un ordre de paix protecteur des églises, des faibles, de la veuve et de l’orphelin. C’est la naissance de l’idéal chevaleresque ou le quadrige classique, prudence, courage, tempérance, justice, fait sa réapparition.

Les faibles opprimés par les forts, établirent donc au-dessus d’eux des défenseurs pour les protéger.

Tel est l’origine mythique de la chevalerie.

Arthur, Lancelot, Perceval, Galaad,  Godefroy de Bouillon, Du Guesclin, Bayard, le chevalier sans peur et sans reproches…. Les chevaliers continuent de faire rêver plusieurs siècles après leur disparition.

Vers l’An Mil, au moment où la société féodale se met en place autour d’une multitude de châteaux forts, une élite de guerriers à cheval se distingue des autres combattants. Ce sont les chevaliers.

La chevalerie est un système de valeurs partagées par les membres de cette aristocratie.

Ce système de valeur s’organise autour de trois pôles :

La prouesse : c’est-à-dire sa capacité à monter sa force physique, d’accomplir un exploit militaire.

La loyauté : le groupe est soudé par des obligations, des échanges de services et il ne s’agit pas de se trahir entre soi, mais de s’épauler dans les combats.

La largesse : c‘est-à-dire le mépris des richesses, le refus de les accumuler et l’obligation par contraire de les dissiper pour le plaisir, par la fête.

Reste la notion d’honneur qui est fondamentale.

L’ensemble de ces valeurs partagées montre qu’il existe une éducation, une idéologie proprement chevaleresque.

Cette idéologie se diffuse à travers des poèmes, des œuvres qui sont faites pour être récitées ou chantées, et qui exaltent précisément la prouesse, la largesse, la loyauté, et plus tard la courtoisie des héros.

Etre chevaleresque, c’est contenir sa brutalité naturelle, se maîtriser, vaincre son propre égoïsme : un système de représentation qui n’est pas complètement évaporé dans notre temps.

En bref, la chevalerie doit sa supériorité sociale à sa mission de protection des faibles (veuves, orphelins) et de l’Eglise dans ses personnes (clergé). Les clercs prient pour tous, les paysans travaillent pour nourrir les deux autres ordres.

La chevalerie pour Etienne de Fougères est un « Haut Ordre » réservé à ceux qui sont nés d’une mère libre et qui ont été « ordonnés » lors d’une cérémonie que l’on nomme adoubement. Le futur chevalier a reçu d’un dignitaire de l’Eglise l’épée déposée sur l’autel, l'épée arme « noble » par excellence et la plus honorée. Ses deux tranchants signifient à ce moment que le chevalier doit servir Dieu et son peuple.

Au vingtième siècle, nous retrouvons cet idéal chevaleresque, d’une part dans la société civile (deux exemples cinématographiques : la grande illusion de Jean Renoir et la guerre des étoiles de Georges Lukas), d’autre part dans nos loges propres au Rite Ecossais Rectifié tant pour les autres que pour nous-même, et nous décidons de ce devenir.

Nous voulons être/ressembler/s’approcher de Galaad, le chevalier parfait pour sa courtoisie et sa pureté comme pour sa force. Tout l’idéalisme de la légende d’Arthur est condensé dans son personnage tel qu’il est montré en exemple dans sa recherche personnelle du Graal.

 

LE MYTHE DU GRAAL (UN MYTHE CHEVALERESQUE MODERNE)

Le mythe de la quête du Graal et de la chevalerie a été inscrit de tout temps sous différentes formes dans la conscience de l’homme; et de tous ces mythes, il reste sans doute l’un de ceux qui s’associent le plus directement aux instances quotidiennes de la vie.

D'aucuns feignent de l’ignorer, préfèrent rester au château de Camelot où le roi Arthur assure protection et confort. D'autres s’amusent à chevaucher quelques temps dans la forêt tout en s’assurant de ne pas perdre le chemin de retour. D'autres encore qui ont pris tous les risques de la quête s’égareront en route et ne parviendront jamais jusqu'au rivage où la pucelle invite au dernier voyage.

Ils en est enfin quelques-uns, rares chevaliers parvenus au château du roi Pécheur, que nul obstacle ne peut faire reculer ni déroger parce que, pour eux, la quête et la vie ne sont qu’une seule et même aventure.

Bienvenue parmi nous.